"VOUS ÊTES L'éLITE DE LA NATION"
La première fois que j’ai entendu cette phrase c’était en classe prépa, par un des profs ou personnel encadrant le jour de la rentrée. Ca a tout de suite attiré mon attention, ce genre de phrase ne laisse pas indifférent. Au début, je trouvais ça presque excitant, l’idée de rejoindre un club aussi exclusif, et d’être promise à quelque chose de « supérieur ». Je suis quelqu’un d’ambitieux et je m’imaginais déjà grande business woman.
C’était l’image que j’avais de la femme moderne à l’époque. Ayant grandi avec une mère au foyer et un père cadre dans un grand groupe, je me disais que je suivais la voie royale. C’était « la classe » !
L’excitation de la rentrée a laissé place à des journées assez monotones et j’ai vite déchanté. La classe prépa c’était dur. Alors certes, j’étais peut-être promise à une belle carrière mais en attendant je trimais en cours. Avec les commentaires acerbes des profs, je cite : « Doit se réveiller. Vite. »
Ce que cela permet d’être « l’élite de la nation »
Au début donc, cette phrase qui se présente à moi pour la première fois : « vous êtes l’élite de la nation ». Une phrase qui est pensée pour nous stimuler et nous inciter à nous surpasser. En prépa, j’ai appris à gérer une charge de travail immense, à ne pas me laisser impressionner par le nombre de polycopiés à lire et synthétiser, à avaler un nombre d’information inconsidérable, à me farcir des listes de vocabulaires en anglais et j’en passe ! En classe prépa, j’ai appris à voir les mauvaises notes défiler sous mes yeux (-2, 0, 4…). A ne pas me décourager, mais plutôt redoubler d’effort pour atteindre mon but.
La classe prépa demande d’avoir une volonté de fer et un mental d’acier, alors qu’on n’a que 18 ans. Je crois honnêtement que la reconversion que j’ai menée en parallèle de mon job m’a paru moins difficile grâce à cette expérience de prépa. Je l’ai fait une fois, je peux le refaire !
J’ai partagé cette phrase sur Instagram il y quelque temps, et ce que j’ai retenu des commentaires, c’est aussi que cette phrase en appelait certains à se responsabiliser. Être l’élite de la nation leur donnait un sentiment d’implication dans leur avenir. Ils n’agissaient pas seulement pour leur carrière mais pour un bien plus grand : l’avenir du pays !
Les limites de « l’élite de la nation » en 2022
Aller plus loin et plus vite, mais surtout plus que les autres !
Cela représente bien l’état d’esprit de la prépa : nous sommes préparés à passer un concours. C’est une compétition, ce n’est pas une épreuve que tous réussiront de la même façon. Devenir « l’élite de la nation » ne se fait pas en co-construction, c’est un chemin solitaire. Cela m’horrifie aujourd’hui de réaliser que les valeurs de partage et de solidarité sont absente de ce système d’études. Cela se perpétue donc bien après, en Entreprise !
L’autre chose c’est que si nous sommes tous voués à rejoindre ce petit club exclusif qu’est l’élite de la nation, à quel moment existons nous individuellement ? Nous serions donc tous voués à la même carrière et notre liberté s’arrête là. Cela explique que les caractères les plus atypiques ou les moins flexibles sont si malheureux en prépa ! Seuls les plus malléables s’en sortent bien, et je suis navrée de dire que j’en faisais partie. L’élite de la nation c’est presque une série de « clones » qu’on prépare à réfléchir comme il faut pour diriger les Grandes Entreprises de demain.
En classe prépa, on nous apprend à travailler dur, très dur. Cela ancre en nous l’idée que si l’on ne travaille pas comme ça, dans la souffrance, on n’ira nulle part et on ne sera personne dans la société. Et cela donne un génération d’adultes qui aujourd’hui donne beaucoup trop de son temps à l’Entreprise et pas assez à soi-même ou au monde.
Enfin, en voilà une bien grande responsabilité pour des jeunes de 18 ans qui n’ont comme seule expérience que celle de gratter des copies doubles, de réciter du Flaubert par cœur ou d’expliquer la crise de 1929 en détail. Être l’élite de la France c’est leur assigner une mission qui n’a pas lieu d’être. A quel moment celle d’un futur architecte ou d’une future agricultrice est bien plus légère ?
Ce que devrait apprendre l’élite de la nation
Je ne prétends pas savoir par quel modèle devrait être remplacées les prépas. Le but de cet article n’est d’ailleurs pas de proposer une alternative. Cependant, il me semble hérité d’un autre temps.
Pour moi, être jeune c’est apprendre à réfléchir par soi-même. Si l’ont veut vraiment parler d’élite de la nation (pas sûre cependant de vouloir garder ce terme !), il nous faut commencer par expliquer aux jeunes que leur singularité fait leur force. A 18 ans, apprendre à se connaître dépasse n’importe quel enseignement !
Que ce soit via des études ou des voyages, avoir 18 ans c’est apprendre quelles sont ses valeurs et ses qualités. C’est apprendre à s’écouter, savoir ce qui est juste pour soi ou pas. Faire des erreurs, et se relever. Prendre confiance en soi !
En ce qui me concerne, je ne me suis jamais sentie faire partie d’une quelconque élite car je n’étais pas à ma place en Entreprise. J’ai suivi toutes les étapes obligatoires d’un parcours d’élite, et me suis perdue en chemin. J’étais totalement déconnectée de qui j’étais. Prendre du recul m’a permis de comprendre qu’il m’avait manqué une étape essentielle dans le processus, qui était celle de me connaître et de m’écouter.
C’est ce que je propose lors de mes coachings : commencer par prendre du recul sur notre parcours et comprendre ce qui nous a amené vers les décisions professionnelles qui l’on jalonné. Pour ensuite réfléchir à sa vie pro idéale !
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